La biographie

Originaire de Oued Yasser, une région se situant à soixante dix kilomètres de la ville d’Alger, le Cheikh Abderrahmane At-Thaâlibi naquit en 1384 au sein d’une famille très pieuse dont la généalogie remonte à Sidna Jâfâr, le cousin du Prophète que la prière et la paix soient sur lui.
Les Thaâliba qui sont les aïeux de Abderrahmane, avaient longtemps gouverné plusieurs régions de l’Algérie dont celle de la Mitidja avant que leur règne ne tombe, en 1378, entre les mains du roi de Tlemcen Abou Hamou qui fut l’un des chefs de la tribu des Abdel Wadi.
L’âpreté des conditions sociales et économiques dans lesquelles At-Thaâlibi vint au monde ne l’empêcheront pas de s’initier très jeune au Coran, à l’histoire et aux sciences de la religion. A l’âge de quinze ans, il rejoignit avec son père la ville de Bejaia où, peu de temps après, celui-ci décéda. Il y demeura sept ans et eut l’occasion d’y côtoyer les plus grands disciples du célèbre Abderrahmane El-Waghlissi (m. 1383) tels que Abû al-Husayn al-Mangalâtî.
Agé à peine de vingt-quatre ans, le jeune Abderrahmane quitta Bejaïa pour Tunis où il vécut huit longues années. Il y fit d’abord la connaissance des cheikhs Mohammed Ibn Khalf al-Ubay et d’Abû al-Mahdi al-Ghabrînî (m. 1413) auprès desquels il s’initia à la mystique et à l’exégèse coranique.
Il partit ensuite vers l’Egypte où il demeura quelques temps auprès de Walî Eddîn al-‘Irâqî (m. 1422), avant de regagner la Turquie où sa vaste érudition fit sensation. En signe de respect et de déférence pour le savant qu’il était, les autorités turques édifieront en son honneur une zawia qui porte son nom et dont on dit qu’elle est aujourd’hui encore parfaitement conservée.
Après ce séjour en Turquie dont at-Thaâlibi devait, à son tour, tirer de nombreux et fructueux enseignements, il retournera de nouveau vers la Tunisie, pays auquel il semble s’être beaucoup attaché en raison, notamment, de la qualité particulièrement chaleureuse de l’accueil dont il y avait bénéficié. Voici, par exemple, ce qu’en dit le Cheikh dans l’un de ses écrits:
«Je constatai alors qu’en ces temps, il n’y avait en Tunisie, par la grâce de Dieu, personne qui puisse m’être supérieur dans la Science des Traditions (‘ilm el hadith). S’il m’arrivait de parler, tous m’écoutaient avec attention et acceptaient ce que je leur rapportais, par modestie de leur part et parce que c’étaient des gens qui savaient reconnaître la vérité. Quelques Maghrébins m’avouèrent un jour : « En vous voyant arriver du pays de l’Orient, par la grâce de Dieu, certains ont vu en vous le Signe de la Tradition (ayat el hadith). Et malgré cela, à chaque fois que j’entendais parler d’une assemblée où les hadiths étaient enseignés, je m’empressais d’y assister. Que Dieu rende cet acte accompli uniquement pour Le satisfaire, et qu’Il nous garde de la vanité et de l’ostentation. »
C’est, enfin, à l’âge de 32 ans (soit en 1412) que le cheikh Abderrahmane At-Thaâlibi entreprit de mettre fin à ses pérégrinations initiatiques par un pèlerinage à la Mecque avant de s’en retourner définitivement à Alger, ville qu’il avait quittée vingt ans auparavant. On rapporte que pendant qu’il parcourait, un jour, les rues de la vieille Casbah, il entendit un jeune homme réciter un verset coranique : «Mangez des choses que votre Seigneur vous a attribuées et soyez-Lui reconnaissants ! Un bon pays et un Seigneur Indulgent » (Coran, s34 v15). « Voilà un joli présage ! » s’écria-t-il. Aussitôt, il prit la résolution de s’établir définitivement à Alger et d’y passer le restant de ses jours.
Peu de temps après, il se vit confier par les autorités de l’époque la Magistrature Suprême, mais préféra abandonner tous les honneurs pour se consacrer à l’ascétisme et à l’initiation à la doctrine. Il disait à ce sujet: « Il est des signes qui montrent que si l’amour qu’on prétend avoir pour le Prophète de Dieu est sincère, il faut renoncer aux plaisirs de ce bas monde, choisir la pauvreté et la vivre».
A ce propos, le Cheikh raconte qu’un soir, il vit en songe le Prophète Mohammed (sur lui le salut) se tenant debout et offrant à manger à des pauvres. Il en donna une part importante au cheikh et lui dit : « Lorsque le Prophète donne de la nourriture à quelqu’un, celui-ci ne doit-il pas aussitôt la vomir ? – « Dois-je donc vomir ? », répondit le Cheikh. Le prophète se courba et reprit : « Ce n’est pas ce que je voulais dire ! ». Après ce songe qui le laissa perplexe, le cheikh Abderrahmane at-Thaâlibi comprit enfin le sens véritable de la vision (ru’ya). Elle lui commandait tout simplement de « se consacrer à l’initiation des gens à la voie de Dieu ».
Il convient, avant de terminer cette bibliographie, de rappeler qu’à l’époque du cheikh at-Thaâlibi (1384-1474), le Maghreb était divisé en trois sous-états qui se distinguaient notamment par l’importance de leurs écoles juridiques: Tunis, Tlemcen et Fès. En ces temps, la ville d’Alger n’offrait encore aucun espace de rayonnement culturel et religieux. La raison en est, écrit Noureddine Abdelkader (1965), qu’elle « ne comptait que quelques écoles qui enseignaient le Coran, les recueils juridiques et les hadiths. Cette ville était donc très démunie du point de vue culturel. Même au plan économique, elle était loin d’atteindre le niveau des grandes villes » (N. Abdelkader, 1965). Il faudra donc patienter le temps que le cheikh y fonde son école Al-Thaâlibiya ainsi que la mosquée qui la jouxte, pour voir y affluer de nombreux étudiants des quatre coins du monde. A partir de là, des familles entières résolurent de s’établir autour de l’école et de sa mosquée lesquelles se transformèrent rapidement en un lieu emblématique d’enseignement et de formation. Dès lors la ville d’Alger, devenue entre-temps capitale du Maghreb, allait être surnommée «La ville de Sidi Abderrahmane».
Le Cheikh Abderrahmane At-Thaâlibi mourut la nuit du vendredi 15 mars 1474 en plein mois de Ramadhan. Il fut enseveli dans son mausolée au cœur de la ville d’Alger. Etaient présents à ses funérailles de nombreuses personnalités politiques et de grands savants parmi ses anciens élèves tels que Shû’ayb Es-Sunuçi, Abd Allah Ez-Ziwawi et Ahmed Zerrûq.
Le Cheikh laissa une descendance se composant de quatre fils (Mohammed Kebir, Mohammed Seghir, Mohammed Abi al-Salihîne et Yahia) et de quatre filles (Fatima, Rûqyyat, Mahdjouba et Aïcha). Tandis que sa fille Aïcha fut enterrée à ses côtés à Alger, la seconde, Zeyneb, fut ensevelie avec son époux, Sidi Mohamen ben Abdelkarim al-Maghîlî (m. 1503), lui-même disciple de Sidi Abderrahmane, dans le sud algérien. Son mausolée porte aujourd’hui le nom de Darîh bint sidi Abderrahmane.
Parmi les intellectuels provenant de la lignée de Sidi Abderrahmane, nous pouvons citer son petit fils Sidi Yekhleftin at-Thaâlibî auprès duquel s’initia le célèbre historien maghrébin al-Tenbeqî. Mais aussi Abû Mehdi ‘Issa at-Thaâlibî (m. 1611 à la Mecque), l’historien du droit Mohammed El-Hedjwinî at-Thaâlibî (Fès, 1874-1956), le nationaliste tunisien Abdel Aziz at-Thaâlibi (1876-1942), l’imam algérien Mohammed-Améziane Toualbi-Thaâlibî (1914-1998) et son frère Mohammed-Chérif. Et, enfin, le psychanalyste et sociologue feu le professeur Noureddine Toualbi-Thaâlibî (1947-2022), ancien recteur de l’Université d’Alger I et auteur de la bibliographie ici présentée du cheikh Abderrahmane at-Thaâlibî.
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